WWF France souhaite que le gouvernement agisse pour « dé-SUViser » l’automobile au profit de voitures plus légères et plus compactes. Abaisser le poids des voitures électriques éligibles au bonus de 2,4 tonnes à 1,6 tonne serait une mesure forte dans cette direction.

Pour ne pas se retrouver face à une pénurie de « métaux critiques », qui freinerait l’adoption des voitures électriques, il existe une solution : la sobriété. C’est en tout cas le message que l’association WWF veut transmettre au travers d’une étude publiée le 9 novembre. Pour inciter les acheteurs et constructeurs, l’organisation souhaite notamment que le gouvernement change une des règles d’attribution du bonus écologique : baisser le poids maximal des véhicules éligibles à 1,6 tonne.

La transition vers la voiture électrique est l’occasion parfaite de favoriser des véhicules plus légers. Or, la tendance actuelle tend plutôt à l’inverse. WWF regrette de voir les gros SUV avec des batteries de 100 kWh se multiplier sur les routes, alors qu’avec la batterie d’un seul de ces véhicules, il serait possible de produire entre 3 à 5 voitures électriques aux dimensions plus raisonnables.

De plus petites batteries pour limiter l’impact de pénuries futures

« Si nous continuons de fabriquer des voitures inutilement trop lourdes, nous pourrions bientôt manquer de métaux critiques pour produire suffisamment de voitures électriques », déclare Isabelle Autissier, présidente d’honneur de WWF France. Elle tire la sonnette d’alarme sur les risques stratégiques liés à l’approvisionnement de certains éléments cruciaux pour la voiture électrique. L’étude de WWF France s’est penchée sur les risques de pénurie en lithium, nickel, cobalt et cuivre, en tenant compte de la progression de la demande d’ici à 2030.

Extrait de l'étude WWF // Source : WWF
Extrait de l’étude WWF // Source : WWF

L’étude a imaginé trois scénarios : laisser-aller, intermédiaire et sobriété pour établir ses conclusions.

Le scénario « laisser-aller » correspond à une inaction du gouvernement à infléchir les ventes des gros véhicules et à ne pas repenser les usages de mobilité. Les petites voitures (segments A et B) continuent leur recul, remplacées par des véhicules de gammes supérieures. La part des SUV croît alors de 45 % (aujourd’hui) à 65 % en 2030. Ici, cette tendance à un accroissement de la taille des véhicules s’accompagne d’un besoin en batteries de tailles croissantes (+ 25 %) pour satisfaire la demande en autonomie associée à l’achat de véhicules lourds. Une situation qui pourrait mener à des crises d’approvisionnement des métaux requis à la fabrication des batteries.

À l’opposé, le scénario de sobriété reprend une meilleure multimodalité des transports et une incitation à choisir des véhicules plus légers et plus sobres. Cette hypothèse permet une baisse des ventes des gros véhicules (SUV et segment D, E et F) et amène à une baisse des capacités des batteries de 30 % par rapport à 2022.

« Plus que jamais, il est urgent de dé-SUViser la voiture française, de multiplier les solutions de mobilités proposées aux français en alternative à la voiture et d’insuffler partout un élan de sobriété », conclue la présidente de WWF France.

Une limitation du poids des voitures électriques irréaliste

Si la démarche de l’organisation écologique prend une direction intéressante, la limite de poids avancée pour attribuer le bonus est un peu exagérée, ce qui pourrait décrédibiliser la piste proposée.

Le bonus écologique actuel ne peut pas être attribué à des véhicules électriques de plus de 2,4 tonnes. WWF France veut inviter le gouvernement à abaisser cette limite à seulement 1,6 tonne pour limiter l’essor de véhicules électriques toujours plus grands.

Les 800 kg de moins excluent beaucoup de véhicules électriques, en commençant par les plus connus comme les Tesla Model 3 et Model Y. La liste est loin de se limiter aux véhicules « premium ». Une Renault Mégane e-tech avec la batterie de 60 kWh dépasse aussi avec 1 624 kg en ordre de marche. Il en va de même du petit Jeep Avenger (de 4 m de long), de la MG4 ou du Hyundai Kona.

Renault Mégane E-Tech // Source : Renault
Une Renault Mégane E-Tech. // Source : Renault

Plutôt que de lister les véhicules électriques à exclure, il est plus rapide de lister les véhicules qui pourraient encore rentrer dans les clous :

Il existerait une dérogation pour les familles nombreuses pour pouvoir acheter un véhicule atteignant jusqu’à deux tonnes tout en bénéficiant du bonus.

Le choix reste trop restreint pour en faire une mesure acceptable. Même si l’on peut observer que la démarche arrive bien à réduire le nombre de SUV éligible au bonus. Après tout, ce n’est pas réellement la catégorie qui bénéficie le plus du bonus écologique, à l’exception de l’entrée de gamme du Tesla Model Y qui apparaît comme l’exception à la règle.

Tesla Model Y // Source : Tesla
Une Tesla Model Y. // Source : Tesla

Une autre idée suggérée par l’étude serait d’exiger des constructeurs automobiles qu’ils fournissent le poids moyen des voitures électriques immatriculées. Les constructeurs seraient ensuite sanctionnés par une pénalité financière de 5 € par kilogramme — excédant les 1,6 tonne fixés — pour chaque voiture vendue dans l’année. Une solution qui ruinerait rapidement les constructeurs allemands, mais devrait épargner un peu plus les constructeurs français, plus modérés dans la prise de poids de leurs véhicules au fil des années.

Si encourager à revenir à des véhicules plus sobres est une très bonne initiative, la méthode prévue par WWF France est peu réjouissante pour l’avenir de la voiture électrique. Il n’en reste pas moins qu’il y a surtout un véritable travail de pédagogie à faire auprès des acheteurs, en insistant sur le fait qu’il est inutile d’acheter des véhicules à grosses batteries pour se rassurer sur l’autonomie. En cassant, cette obsession de la grande autonomie, le public achètera de lui-même des véhicules plus sobres et plus abordables.

Soyez à la pointe de l’actualité de la mobilité électrique en vous inscrivant à notre newsletter hebdomadaire Watt Else. Elle est spécialement conçue pour tout comprendre aux enjeux de la voiture électrique, le tout sans langue de bois.

Découvrez les bonus

+ rapide, + pratique, + exclusif

Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l'I.A, contenus exclusifs et plus encore.

Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci

Il y a une bonne raison de ne pas s'abonner à

Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.

Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :

  • 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
  • 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
  • 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.

Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.

S'abonner à Numerama+

Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez-nous sur WhatsApp !