Parmi les différences entre une voiture électrique et une voiture thermique, les conducteurs mettent souvent en avant le fameux freinage régénératif. En somme, cela permet de faire ralentir la voiture sans pour autant avoir à appuyer sur la pédale de frein, tout en récupérant de l’énergie, et ainsi recharger un peu la batterie.
Certains constructeurs ont poussé un peu plus loin ce principe, permettant d’aller jusqu’à l’arrêt complet en ne reposant que sur le freinage régénératif. C’est ce que l’on appelle la conduite à une pédale. Certains la voient comme une condition primordiale à la conduite de leur véhicule, quand d’autres aimeraient pouvoir s’en passer. Que permet-elle ? Est-ce véritablement indispensable ?
Une seule pédale pour tout faire, ou presque
Le concept de conduite à une pédale n’est pas nouveau. La Nissan Leaf de seconde génération, sortie en 2017, avait d’ailleurs fait beaucoup parler d’elle en proposant un mode de conduite dédié, avec la technologie e-pedal. Avant cette seconde génération de Leaf, la première ne permettait pas d’aller jusqu’à l’arrêt complet. Le fonctionnement était bien plus classique : il fallait freiner avec la pédale de gauche pour pouvoir s’arrêter.
Bien entendu, qui dit nouveau mode de conduite dit temps d’adaptation nécessaire pour celles et ceux qui viennent du monde des véhicules thermiques, ou même des véhicules électriques sans conduite à une pédale. Il y a effectivement un côté déroutant les premiers jours, au volant d’une voiture qui ralentit franchement lorsqu’on lâche la pédale d’accélérateur, et pour laquelle il n’y a pas à freiner physiquement pour s’arrêter.
En pratique, il ne s’agit pas de lâcher complètement la pédale d’accélérateur d’un seul coup, mais bien de doser son accélération et son freinage uniquement avec la pédale de droite. Pour faire une analogie parlante, imaginez une télécommande de voiture radiocommandée : il n’y a pas de frein, mais simplement de quoi faire avancer ou ralentir la voiture avec la même gâchette.
Comme souvent avec un changement aussi drastique dans les modes de conduite, les premiers retours peuvent être négatifs. C’est anti-naturel — lorsqu’on a plusieurs décennies de conduite thermiques derrière soi — et parfois inconfortable, tellement la voiture ralentit lorsqu’on retire son pied de la pédale de droite. Mais, une fois les premiers moments d’adaptation passés, c’est un vrai bonheur.
Ce que change la conduite à une pédale
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Grâce à la conduite à une pédale, la récupération d’énergie en ralentissant est maximale, puisque les freins mécaniques ne sont pas sollicités. On peut alors s’imaginer que la consommation est fortement optimisée et que cela peut faire une réelle différence, notamment en milieu urbain. Sur un cycle d’homologation WLTP, certains constructeurs affirment jusqu’à 25 % d’autonomie récupérée en plus grâce à la conduite à une pédale. En réalité, le gain de consommation est marginal par rapport à un freinage régénératif puissant, mais sans aller jusqu’à l’arrêt complet. C’est loin d’être l’argument numéro 1 pour la conduite à une pédale.
Le véritable gain est au niveau du confort de conduite, puisque la pédale de frein n’est là que pour les urgences, et non plus pour systématiquement s’arrêter. En anticipant correctement, il n’y a plus besoin de toucher à la pédale de frein pour les feux rouges, les panneaux Stop ou les ronds-points. En ville, c’est vraiment une conduite plus agréable où le maître-mot est bien l’anticipation.
Pour les conducteurs, l’expérience est généralement excellente une fois que sont passés les premiers tours de roues. Les manœuvres à basse vitesse se font uniquement avec la pédale d’accélérateur : pour se garer en marche arrière, c’est une petite révolution.
Naturellement, un des effets secondaires de cette conduite à une pédale est l’allongement de la durée de vie des plaquettes de frein. Sans exagérer, au quotidien et en milieu urbain avec une Tesla Model Y par exemple, qui bénéficie de la conduite à une pédale, freiner est réellement un acte exceptionnel. Comme conducteur, on ne veut d’ailleurs plus s’en passer.
Les conducteurs habitués ne veulent plus s’en passer
Lorsqu’on sonde rapidement les conducteurs de voiture électrique, la conduite à une pédale fait partie des avantages qu’ils ne veulent pas perdre. Devoir manœuvrer avec le pied sur le frein semble une régression conséquente, de même que tout simplement rester avec le pied sur le frein au feu rouge pour éviter d’avancer.
Pour les automobilistes qui n’ont jamais fait l’expérience de la conduite à une pédale, tout ceci peut sembler très abstrait, mais c’est bien réel. Cela devient d’ailleurs un argument fort au moment de changer de voiture, qui se vérifie facilement lorsque l’on doit essayer une nouvelle voiture. Il y a énormément de bonnes voitures électriques disponibles, mais sans conduite à une pédale, certains modèles sont hors-jeu dès le départ.
Les points de vue officiels des constructeurs diffèrent avec le temps sur la conduite à une pédale, comme nous l’a montré l’exemple de Nissan avec l’Ariya en 2023. Alors que le système e-pedal existait sur la Leaf 2, Nissan a décidé de faire l’impasse sur sa nouvelle voiture électrique. Sa justification ? Certains retours de clients étaient négatifs, notamment au sujet des manœuvres à basse vitesse. Pourtant, cet argumentaire ne tient pas la route : sur la Leaf 2, c’était un mode de conduite optionnel. Les conducteurs avaient donc le choix d’utiliser ou non la conduite à une pédale selon leur préférence.
Il n’existe pas de statistiques indiquant la part de clients qui font de la conduite à une pédale un argument de choix en voiture électrique. Cependant, il y a fort à parier que cette proportion ne va faire que grandir, avec la hausse de la part de véhicules électriques parmi les ventes. Tant que l’on n’y a pas goûté, on ignore à quel point c’est indispensable. Mais, ne pas le proposer du tout en 2024 est inexcusable. Tentons tout de même de comprendre pourquoi c’est toujours le cas.
En 2024, ne pas proposer de conduite à une pédale est inexcusable
Ce qui précède était peu ou prou une ode à la conduite à une pédale. Pour autant, certains constructeurs ne proposent pas encore l’option, alors même qu’elle devrait être la manière par défaut de conduire une voiture électrique. La Renault 5 E-Tech est un excellent exemple d’une voiture électrique prometteuse, que beaucoup ont eu envie de posséder en la découvrant lors de sa révélation, mais qui déçoit avant même d’être disponible à la commande.
Renault a effectivement confirmé que la conduite à une pédale ne serait pas de la partie à la sortie de la voiture, sans pour autant fermer la porte à une disponibilité l’année suivante. Les conducteurs de voiture thermique qui possèdent également une électrique peuvent préférer un mode de conduite plus traditionnel, pour éviter que leur mémoire musculaire soit prise en défaut. De même, les nouveaux arrivants dans la mobilité électrique peuvent se sentir plus à l’aise dans une voiture qui se conduit presque comme une thermique. Ce sont souvent ces arguments qui sont repris par les constructeurs ne proposant pas de conduite à une pédale.
À ces constructeurs, on peut répondre que c’est à eux de laisser le choix des différents modes de conduite, plutôt que de forcer la main — ou plutôt le pied — aux clients. Cependant, proposer une conduite à une pédale aboutie implique un développement logiciel qui n’est pas anodin, pour gérer la transition entre le freinage régénératif et le blocage des roues à l’arrêt complet. C’est évidemment plus compliqué que de passer en roue libre une fois que la vitesse est descendue à 10 km/h ou moins.
Voilà ce qui incite beaucoup de constructeurs à prendre la voie de la facilité en faisant l’impasse sur la conduite à une pédale. D’ailleurs, on peut s’imaginer que sur des plateformes de fabrication mutualisées entre motorisations thermiques et électriques (par exemple, pour la Peugeot e-208), le fait de ne pas s’embêter avec la conduite à une pédale permet des économies conséquentes.
Toutefois, le nombre de clients potentiellement perdus est déjà important, et ne va sans doute faire que s’accroître. Il conviendrait alors pour tous les constructeurs réticents à cette fameuse conduite à une pédale de revoir leur copie, s’ils veulent tenter de reconquérir des conducteurs passés chez la concurrence.
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