Tout est bon pour nuire à la voiture électrique, même les enquêtes bancales ou infos farfelues. L’édito de la newsletter Watt Else du 14 mars revient sur la recrudescence de ce type de contenus lors des périodes d’élection et pourquoi il est nécessaire de les utiliser avec précautions.

Les périodes électorales sont du pain bénit pour les lobbies. Un moment où tous les coups sont permis pour influencer l’opinion publique, y compris diffuser quelques fakes news ou détourner quelques études. C’est ce que l’on peut actuellement observer du côté des États-Unis. La voiture électrique est l’un des symboles d’une guerre politique soutenue entre le camp Biden et celui de Trump. 

Ne croyez pas que l’Europe soit complètement épargnée. Même si les élections européennes n’enthousiasment pas les foules, les opportunités existent pour diffuser des discours du même acabit.

« Les voitures électriques émettent plus de particules polluantes »

Comment réagir face à cette tribune publiée sur le Wall Street Journal du 3 mars, qui annonce que les voitures électriques émettent plus de particules polluantes que des véhicules thermiques récents ? C’est le retour fulgurant du « carburant propre ». Comme si les Américains avaient déjà oublié que la dernière fois qu’un constructeur s’est aventuré sur ce terrain, cela a mené au dieselgate, et donc l’accélération à marche forcée vers l’électrique. 

Le New York Post a repris l’article en surenchérissant sur le titre : « Une étude révèle que les véhicules électriques rejettent plus d’émissions toxiques et sont plus nocifs pour l’environnement que les voitures à essence ». 

Une Tesla Model Y chaussée de pneus Pirelli Sottozero // Source : Bob JOUY pour Numerama
Une Tesla Model Y chaussée de pneus Pirelli Sottozero // Source : Bob JOUY pour Numerama

C’est une étude de 2022 de l’entreprise Emission Analytics qui est exhumée pour l’occasion. L’objectif : expliquer que les voitures électriques, plus lourdes, usent davantage leurs pneumatiques, ce qui génère une pollution supérieure aux modèles thermiques. La véritable conclusion de l’article étant : il faut stopper la politique de Biden vis-à-vis des voitures électriques. Nous y voilà ! 

Tout ça pour des particules de pneus ?

Les pneumatiques polluent, c’est un fait. Avion, métro, bus, camion, voiture ou vélo, tous ces moyens de transport émettent des particules polluantes à cause de leurs pneus. C’est même « la deuxième source de pollution plastique marine, derrière les particules issues des lessives », me confiait Dominique Stempfel, le président du syndicat des professionnels du pneu. Selon lui, l’un des objectifs des manufacturiers est de remplacer les matières problématiques actuelles par des matériaux biodégradables à l’avenir.

C’est irréfutable, si une voiture « mange du pneu », elle est plus polluante. Est-ce pour autant un défaut uniquement imputable à la voiture électrique à cause de son surpoids ? Non ! Ou alors, il faudra me prouver qu’une Dacia Spring de 1 tonne consomme plus de pneus qu’une Mercedes Classe A AMG avec un kéké qui fait des burns au volant, qu’une Porsche 911 ou qu’un gros Range Rover. La durée de vie d’un pneu n’est pas qu’une affaire de voiture, encore moins exclusivement d’électrique, plusieurs facteurs entrent en compte : la conduite, la qualité du pneu et l’infrastructure routière.

En effet une électrique comme celle-là pollue à cause de ses pneus // Source : Audi
En effet une électrique comme celle-là pollue à cause de ses pneus // Source : Audi

Un autre point attire l’attention sur le sérieux de l’étude ou de son interprétation. Il est mentionné que les voitures électriques consomment également plus de freins à cause de leur poids. Une déclaration qui fera bondir tous les possesseurs d’électriques, tant il a déjà été démontré que cet argument est faux. C’est même tout le contraire grâce au freinage régénératif

Une autre étude anglaise l’avait bien mis en lumière l’année dernière, concluant que si les voitures électriques avaient usé leurs pneus avant des modèles hybrides ou thermiques, elles se rattrapaient sur les faibles émissions de particules de frein et aucune émission à l’échappement.

Pendant ce temps-là aux USA, les énormes pickups (aux pneus non polluant) font du roll coal !

Produire c’est polluer

Il va certainement falloir le répéter, mais la voiture électrique n’est pas la solution « parfaite ». Il n’en existe pas. C’est « la moins mauvaise des alternatives » à notre disposition pour continuer à profiter d’une liberté individuelle de se déplacer. Toute production humaine sera forcément source de pollution, qui peut être plus ou moins compensée ou valorisée sur son cycle de vie. 

Ne soyez pas surpris, on continuera à voir des publications ou discours anti-VE. Affirmant, sur la base d’une étude lambda, que la voiture électrique pollue plus à cause de son liquide lave-glace, ou que les batteries des voitures sont jetées tous les 5 ans. Plus c’est gros, plus ça passe ! 

Cet édito Watt Else fera forcément réagir. Il est nécessaire de prendre du recul et savoir lire entre les lignes de certaines informations. Chaque semaine, la newsletter contient un édito épicé et une sélection d’actualités sur le thème de la mobilité électrique, n’hésitez pas à vous abonner.

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