La branche européenne de Ford est en plein lancement de son dernier modèle 100 % électrique nommé Explorer. Mais, en dehors des initiés de la marque, ce modèle va certainement avoir pas mal de chemin à faire pour s’imposer à l’esprit des acheteurs. Un peu comme pour le Mustang Mach-e, l’Explorer EV risque de pâtir du déficit d’image de la marque américaine en Europe depuis quelques années.
Alors que la branche européenne de Ford a longtemps eu une certaine autonomie pour proposer des véhicules adaptés à notre marché, elle serait en train de perdre cette liberté. Selon un article d’Automobilwoche du 8 juillet, le siège américain reprendrait progressivement le contrôle.
Fin de l’indépendance de Ford Europe
Ford Europe a perdu son directeur en juin. Martin Sander a choisi de rejoindre les équipes de Volkswagen. À la suite de ce désistement, Jim Farley (PDG de Ford) a fait un grand ménage de printemps dans la direction de la branche européenne en retirant le pouvoir à 7 autres directeurs sur 9. Le management basé en Allemagne doit maintenant rendre des comptes directement au siège américain de Détroit. Autant dire que le peu d’indépendance que pouvait avoir Ford Europe a désormais disparu.
Pour Ford, la situation s’apparente un peu à un serpent qui se mord la queue. Depuis que sa gamme de véhicules a été réduite et que les nouveautés se sont raréfiées en Europe, Ford perd petit à petit des parts de marché. Les modèles thermiques et hybrides Puma, Kuga et Focus concentrent l’essentiel des ventes de la marque. Les ventes d’électrique n’ont représenté que 3,85 % des immatriculations en 2023 (avec uniquement Mustang Mach-E), c’est à peine mieux sur le premier semestre 2024 en dépassant les 4,2 % malgré d’importantes ristournes sur le modèle.
Les bénéfices du constructeur reposent alors à 98 % sur le marché américain. Or pour se relancer, il faudrait des investissements massifs et des nouveaux produits en phase avec les attentes des clients européens, mais Ford voit de moins en moins d’intérêts financiers dans l’opération. La situation semble quelque peu dans une impasse.
Des investissements trop limités pour plaire à la clientèle européenne
Ford a bien investi 2 milliards d’euros pour transformer l’usine de Cologne pour accueillir la production des véhicules électriques. La marque va y produire les nouveaux Ford Explorer, sur la plateforme MEB de Volkswagen, et le modèle Capri qui en sera dérivé. Hélas, ces deux nouveaux modèles électriques sont lancés tardivement et sur le marché le plus concurrentiel et saturé. Autant dire que même si l’Explorer a des qualités intrinsèques, il n’est pas spécialement attendu par le public.
Ford Europe aurait eu tout intérêt à parier sur un véhicule électrique plus petit de type citadine ou crossover urbain à petit budget, mais la marque est-elle vraiment en mesure de le faire ? Rien n’est moins sûr. Jim Farley a quand même annoncé une grosse refonte de la conception des futurs modèles électriques pour en faire baisser les coûts. Mais il n’est pas exclu que cela ne concerne que des modèles adaptés pour le marché US.
Jim Farley a fait une déclaration d’amour à la voiture électrique
C’est finalement tout un paradoxe qui entoure la voiture électrique chez Ford. La marque est capable de produire des produits qui sont assez bien pensés, mais entre les soucis de production et les difficultés à trouver leur clientèle aux USA, leur succès est mitigé. Pourtant, le Mustang Mach-e et le pickup F-150 Lightning sont de bonnes voitures électriques, ils ne sont hélas pas réellement adaptés pour le marché européen.
Cela n’a pas empêché Jim Farley de faire une déclaration aux voitures électriques sur le réseau social X le 28 juin dernier. Le message est même titré : « Confessions d’un amateur de voitures à essence. J’aime les véhicules électriques et cela n’a rien à voir avec la politique. »
Dans ces quelques lignes, le patron de Ford tente de tordre le cou aux idées reçues sur la voiture électrique, avec tout un plaidoyer sur les avantages des motorisations électriques, y compris pour un fan de voitures thermiques. Il veut aussi démontrer que Ford ne baissera pas les bras face à la Chine et l’Europe face à ce sujet et que la marque va continuer à se battre. Aux USA, nul doute que la marque réussira à tirer son épingle du jeu, le doute subsiste par contre pour l’avenir de la branche européenne.
On approuve en tout cas la conclusion de la déclaration de Jim Farley : « Je pourrais dire que les véhicules électriques sont un excellent choix pour de nombreuses personnes. Mais il vaut mieux en essayer un soi-même et prendre sa propre décision. Qu’y a-t-il de plus américain que cela ? Qui sait, vous pourriez vous surprendre vous-même. Je sais que c’est le cas. »
Certaines marques historiques pourraient bien se louper sur la transition vers la voiture électrique, même en y mettant de la bonne volonté. Pour suivre cette tendance, abonnez-vous à notre newsletter éditorialisée Watt Else.
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