L’implantation des usines de voitures électriques est désormais un choix économique, social, mais aussi politique. Et ce n’est pas toujours pour le meilleur, c’est ce que l’on observe dans l’édito de la newsletter Watt Else du 11 juillet.

Jamais l’implantation d’usines de voitures électriques n’avait fait couler autant d’encre que ces dernières années. À l’exception des Gigafactory de Tesla, l’installation des usines a longtemps suscité l’indifférence, sauf quand cela impliquait des fermetures chez les constructeurs nationaux. Le mouvement de délocalisation vers des pays à moindre coût a entraîné une forme de résignation. 

Mais la tendance est en train de s’inverser. Le choix de l’implantation d’un site de production est redevenu un enjeu crucial. Le sujet apporte même sa dose de drama dans l’actualité automobile. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les choses bougent vite, alors même que les projets d’usine sont habituellement gérés sur du temps long.

Nouveau joujou des politiques 

Les dirigeants politiques des différents pays se battent désormais pour accueillir les usines de production de voitures électriques et de batteries haute tension. À grands coups de subventions et autres avantages, ils tentent de convaincre les marques de s’implanter chez eux, plutôt que chez le voisin. 

Assemblage de Model Y à la Gigafactory Tesla Berlin // Source : Capture vidéo Tesla
Assemblage de Model Y à la Gigafactory Tesla Berlin // Source : Capture vidéo Tesla

On assiste ainsi à des scènes relativement surréalistes, comme le gouvernement français (notamment Bruno Le Maire) qui sort la brosse à reluire afin de convaincre BYD de choisir la France pour son usine. Quelques mois plus tôt, le même ministre avait pourtant tenu des propos anti-constructeurs chinois sur la scène du Paris Automotive Summit 2022, alors que le DG Europe de BYD se tenait à quelques mètres de lui. Sans surprise, BYD a choisi la Hongrie plutôt que la France.

Le maintien de la production locale est aussi source de querelles. Le meilleur exemple est probablement le match sans fin entre Stellantis et le gouvernement italien. L’Italie n’hésite pas à draguer en même temps tous les constructeurs de voitures électriques qui voudraient bien venir produire dans le pays. Un paradoxe quand le pays est connu pour être l’un des plus réfractaires en la matière. N’y cherchez pas de cohérence, il n’y en a pas. 

Le chantage à la taxe pour faire venir des usines

Avec la surtaxe sur les véhicules électriques produits en Chine, l’Europe a décidé d’user d’un léger chantage pour précipiter les décisions d’implantations en Europe. Plusieurs constructeurs chinois avaient déjà des projets dans les tuyaux : MG, BYD, Chery. D’autres s’interrogent encore sur la solution à adopter : pour Nio, une telle décision n’est pas rentable pour l’heure, Xpeng y songerait de son côté.

Xpeng arrive en France // Source : Xpeng
Xpeng arrive en France // Source : Xpeng

Même les constructeurs les plus jeunes en sont bien conscients : des sites de production proches des marchés visés permettent généralement de contenir les coûts de transport qui ont flambé. Cependant, construire ou reprendre une usine n’est pas un investissement à prendre à la légère. Il faut que les ventes sur le marché soient suffisantes pour rentabiliser l’installation. C’est d’autant plus compliqué dans un contexte de ralentissement de la demande. 

À la recherche d’un plan B

Il se murmure que Magna Steyr — l’usine de montage autrichienne notamment utilisée par feu Fisker — a été contactée par plusieurs constructeurs chinois pour assembler des véhicules, mais rien n’a été confirmé pour le moment. Cela pourrait être une bonne alternative pour les constructeurs à faibles volumes.

Production des Fisker Ocean dans l'usine autrichienne  // Source : Fisker
Production des Fisker Ocean dans l’usine autrichienne de Magna Steyr // Source : Fisker

Une autre possibilité serait d’implanter des usines en périphérie de l’Europe. La Turquie a confirmé que BYD allait ainsi y installer une usine. Les rumeurs voudraient que le groupe chinois utilise cette porte d’entrée pour contourner les restrictions de l’Europe. Il faut cependant rester prudent sur le sujet : la Turquie pourrait surtout chercher à attirer d’autres constructeurs avec cet argument non vérifié. 

Cette sanction européenne contrarie aussi les plans de constructeurs européens : BMW, Mini, Cupra et Dacia. L’Argus relançait cette semaine la possibilité pour Dacia de relocaliser en Europe la production de sa Spring, mais là encore, il ne s’agit que de rumeurs. 

En attendant, pendant que de nouvelles usines sont annoncées avec entrain dans toute l’Europe, d’autres marques cherchent à sauvegarder certains sites de production. Audi ne va peut-être pas pouvoir conserver sa production en Belgique. C’est aussi l’autre facette de ce sujet. Il ne faudrait pas que les implantations tournent au jeu des chaises musicales, où l’on élimine des participants à chaque nouveau tour.

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