La voiture électrique apporte de nombreuses vertus dans les pays où elle se développe. Elle a cependant un défaut de taille pour les gouvernements dont les finances reposent massivement sur les taxes et les impôts : sans carburant, pas de taxes juteuses entrant dans les caisses de l’État. En tout cas, bien moins que pour les véhicules roulant à l’essence ou au diesel. Les gouvernements font donc leurs calculs et cherchent des solutions pour ne pas souffrir d’un manque à gagner avec la transition en cours vers le véhicule électrique.
Comme souvent dans ces situations, la créativité ne manque pas, toutefois la mise en place est un peu plus compliquée. C’est ce qu’expérimente la confédération Suisse depuis presque 2 ans, hésitant entre deux solutions pour taxer les véhicules électriques : la taxe au kilomètre ou la taxe au kilowattheure. Le sujet a refait surface avec un article de 20 Minutes ce 18 juillet 2024, à quelques mois d’une grande consultation nationale.
Le principe de ces taxes d’un nouveau genre pour les voitures électriques
L’une des solutions envisagées est de taxer la recharge : c’est la taxe au kilowattheure. Un peu comme un automobiliste qui irait faire son plein de carburants, l’électromobiliste se retrouverait taxé sur les recharges. Mais s’il est assez aisé de taxer la recharge publique, comment taxer la recharge effectuée à domicile, voire celle réalisée en autoconsommation de panneaux solaires ? Il y a donc un grand trou dans la raquette.
Le second défaut de cette stratégie est qu’elle va pousser à recharger dans les pays voisins pour les frontaliers. La recharge rapide en Suisse n’est déjà pas spécialement bon marché. Il faut généralement compter entre 20 et 30 centimes de plus qu’en France, avec une fourchette allant de 0,45 € à 0,90 €, selon le média RTS. Beaucoup d’automobilistes qui traversent le pays tentent par tous les moyens de ne pas s’y charger. Les stations situées à proximité des frontières sont par contre très sollicitées. Une nouvelle taxe ne va pas arranger la situation.
La Suisse envisage donc une autre hypothèse : celle de taxer les kilomètres parcourus. Cette initiative soulève de nombreux débats en ligne. Il s’agirait d’installer, dans les véhicules électriques immatriculés en Suisse, des traqueurs GPS pour suivre les kilomètres parcourus par ces voitures et les taxer en conséquence. Une idée qui ne sort pas de l’imagination des Suisses, puisqu’elle a déjà été testée en Australie de manière assez éphémère. Les conducteurs de voitures électriques et hydrogène australiens devaient payer l’équivalent de 2 centimes d’euros de taxe par kilomètre, et un peu moins pour les modèles hybrides.
L’Australie a déjà fait machine arrière
À sa mise en place dans plusieurs États d’Australie, la mesure avait fait grand bruit jusqu’en Europe. Cette manière de taxer les voitures électrifiées était apparue comme une épée de Damoclès au-dessus de l’ensemble des conducteurs d’électriques du monde entier.
Pour autant, si les débuts de cette taxe en Australie ont été très médiatisés, moins de 2 ans plus tard, celle-ci a été jugée anticonstitutionnelle. C’est la cour de justice australienne qui a tranché la question après avoir été saisie par les automobilistes. La taxe a disparu presque aussi vite qu’elle est apparue, cette fois dans l’indifférence générale.
Les limites d’une taxe au kilomètre
Ce qui est éventuellement réalisable en Australie, qui est un pays entouré d’eau, n’est sans doute pas aussi évident à mettre en place en Suisse (ou ailleurs en Europe). Il n’est pas vraiment dans les habitudes des Suisses de ne circuler qu’au sein de leurs frontières. Or, il est impossible pour la confédération Suisse de taxer les kilomètres parcourus en dehors du territoire suisse. Il faudrait alors que les véhicules soient équipés d’un traqueur intelligent capable de distinguer quand la voiture franchit la frontière. C’est donc une première complication de taille.
Le second point de complication est dans la suite logique : pour facturer les kilomètres parcourus, il faut que le gouvernement ait accès aux données personnelles. Il se poserait alors forcément la question de la protection des données des conducteurs de ces véhicules.
Autant dire que si l’idée semble simple en apparence, elle risque de ne pas être bien accueillie par la population, qui aura à s’exprimer sur le sujet. Transposée à la France, cette idée de taxer les kilomètres parcourus des voitures électriques pourrait également créer une nouvelle crise. Les habitants des campagnes seraient ainsi largement défavorisés par rapport aux habitants des villes, un élément qui risque de ne pas passer au niveau de la constitution française. Mais nos gouvernants trouveront bien autre chose, comme un malus au poids.
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