Après les assureurs, ce sont les spécialistes européens du leasing automobile qui commencent à se plaindre de la voiture électrique. Mais pourquoi ?

Les sociétés de leasing automobile menacent de faire flamber les prix des locations de voitures électriques. Tout ceci pourrait bien ralentir l’adoption des véhicules électriques au moment où il faudrait qu’ils soient de plus en plus abordables pour séduire le public. Les assureurs avaient aussi haussé le ton quelques mois auparavant pour dénoncer des réparations bien plus coûteuses qu’estimées, ce qui ne fait pas les affaires des sociétés d’assurance.

Que reprochent les sociétés de leasing à la voiture électrique ? C’est ce que Reuters a creusé auprès des entreprises concernées dans une publication du 13 août.

Trop de dépréciation du véhicule électrique

Au moment de la signature du contrat, la dépréciation du véhicule sur la période de la location est calculée. La valeur résiduelle ou le prix de revente estimé va donc définir en partie si le loyer proposé sera plutôt abordable ou non. Au-delà du montant même du véhicule, c’est cette donnée qui explique parfois les grandes fluctuations entre deux modèles d’une valeur initiale équivalente. Si le loyer apparaît abordable, c’est que le tarif de revente devrait se maintenir assez bien dans le temps ; au contraire, si le loyer est plus élevé, c’est probablement à cause d’un risque de décote plus prononcée du modèle.

Tesla Model Y // Source : Tesla
En jouant avec ses prix neufs, Tesla a agacé les sociétés de leasing // Source : Tesla

Le problème que rencontrent les loueurs est le suivant : leurs estimations ne collent pas toujours à la réalité du marché de l’occasion au moment du retour de ces véhicules. Les contrats de location s’établissent généralement pour 36 mois, soit 3 ans. Tous les véhicules électriques loués depuis 3 ou 4 ans reviennent chez les loueurs, alors que la demande d’occasion n’a pas encore explosé. Ils se retrouvent à perdre de l’argent avec des véhicules qui se vendent moins que prévu. On comprend facilement que les entreprises financières détestent prendre un tel risque s’ils sont perdants au bout.

Certains loueurs ont déjà changé leurs habitudes : ils conservent les modèles plus longtemps dans leur portefeuille en remettant le véhicule en leasing en deuxième et troisième main. De quoi normalement mieux rentabiliser l’investissement initial.

Des loyers en hausse dans plusieurs pays européens

Dans les pays européens où les aides gouvernementales pour la voiture électrique ont été supprimées, la répercussion sur les loyers ne s’est pas fait attendre chez les grands loueurs. Certains tarifs ont plus que doublé sur les dernières années. Or, pour la voiture électrique, il est difficile de se passer de ces intermédiaires financiers. Jusqu’à 80 % des voitures électriques neuves sont prises en leasing plutôt qu’en achat comptant ou crédit classique, selon les données de marché de Dataforce. Un changement dans la manière de consommer l’automobile qui rend les entreprises et les particuliers particulièrement dépendant du bon vouloir des loueurs.

Audi Q8 e-tron et Audi Q8 e-tron Sportback // Source : Audi
Audi Q8 e-tron équipe beaucoup les entreprises et donc souvent vendu en leasing // Source : Audi

La France semble relativement épargnée par cette flambée des loyers sur les voitures électriques. Si certains prix font parfois les montagnes russes d’une opération commerciale à l’autre, les tarifs proposés restent assez stables chez les constructeurs selon nos propres observations, en tout cas pour le prix d’appel promu par les marques. Mais, les choses peuvent se gâter selon qui finance le leasing.

Les constructeurs arrivent souvent à proposer des offres encore attractives par rapport aux modèles thermiques. Pour certains, ces locations passent par leur propre branche financière, ce qui leur permet de mieux contrôler le processus. Cependant, tous les constructeurs ne sont pas logés à la même enseigne à ce niveau-là. Les négociations avec les gros loueurs font aussi partie des impératifs des marques qui veulent vendre en Europe. C’est ce qu’ont notamment dû faire les constructeurs chinois.

Essai de la MG4 Luxury // Source : Raphaelle Baut
MG a du trouver un partenaire financier pour offrir des loyers bas // Source : Raphaelle Baut

Tout ceci ne se fait pas sans quelques efforts financiers des constructeurs dans tous les cas. Reuters rapporte que certains constructeurs automobiles ont également offert des compensations financières ou des remises aux sociétés de leasing pour compenser la baisse de la valeur des véhicules électriques. Tesla n’est pas en reste après avoir un peu trop joué au yoyo avec les prix de ses véhicules neufs, cassant la bonne dynamique de la valeur résiduelle de la marque.

Une menace sur les prix s’ils sont contraints à plus de VE

Les sociétés de leasing ne s’expriment pas en détail sur les pertes engrangées spécifiquement sur l’activité du véhicule électrique, mais les rapports financiers le mentionnent de plus en plus régulièrement. C’est une manière de faire passer le message.

Ce que redoutent désormais les loueurs, c’est que la Commission européenne leur impose des quotas bien plus élevés de véhicules électriques. Cela augmenterait le risque pris par ces entreprises. La réponse des loueurs est une menace assez claire : plus la voiture électrique leur fera prendre des risques, plus les prix des loyers flamberont. Ce qui pourrait mettre à l’arrêt tout le marché automobile, y compris thermique.

Cela ressemble donc surtout un coup de semonce pour qu’on ne leur force pas trop la main. Nul doute qu’ils ont été inspirés par l’initiative des assureurs, qui a plutôt bien fonctionné sur l’opinion et les personnalités politiques.

Le marché de la voiture électrique perturbe les habitudes de certains acteurs de la finance et des assurances, qui ne gagnent plus autant qu’auparavant. C’est une tendance à suivre dans notre newsletter hebdomadaire Watt Else

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