Ces reportages à charge contre la voiture électrique sont bien trop nombreux et bien trop fréquents. Il est temps que la mentalité des médias évolue. C’est un cri du cœur qui a motivé cet édito de la newsletter Watt Else du 15 août.

À l’heure où le monde doit se battre au quotidien pour distinguer la vérité des fake news, les grands médias doivent veiller à conserver un minimum de crédibilité, y compris sur les sujets qui ne sont pas leur spécialité. Or, quand il est question de voitures électriques, on assiste bien trop régulièrement à une surenchère de désinformation.

J’aimerais tellement ne plus avoir à consacrer du temps à démêler le vrai du faux du travail réalisé par des confrères et des consœurs à des heures de grande écoute. C’est hélas bien mal parti. Un reportage diffusé en prime time pendant le JT de TF1, ce lundi 12 août, a encore remis de l’huile sur le feu.

Quand l’histoire est écrite d’avance

Les longs trajets en électrique sont devenus le nouveau marronnier des médias généralistes au moment des vacances. Le récit d’une catastrophe annoncée a quand même quelque peu évolué ces dernières années. Il arrive même que certains de ces reportages soient honnêtes. Il ne s’agit en effet pas de masquer au public la réalité de l’autonomie moindre sur autoroute, des bornes de recharge en panne, de l’attente à certaines stations ou du surcoût des recharges sur autoroute. C’est une réalité, mais qu’il faut quand même pondérer.

Volkswagen ID.4 lors de notre essai en 2021 // Source : Raphaelle Baut pour Numerama
Volkswagen ID.4 lors de notre essai en 2021 en Baie de Somme // Source : Raphaelle Baut pour Numerama

Il n’y a encore pas si longtemps, certains reportages reprochaient à la voiture électrique d’avoir besoin de plus de 24 heures pour réaliser un Paris-Lyon. Un sujet buzz qu’il est difficile de reproduire honnêtement aujourd’hui avec les moyens disponibles. Bien que l’on ne soit jamais à l’abri de journalistes qui voudraient traverser la moitié de la France à bord d’une Renault 5 électrique de 1972 pour conclure que « ce n’est pas encore au point ». C’est ce que l’on ne veut plus voir.

Hélas, il ne faut pas être dupe. À trancher entre un sujet plat d’un trajet sans encombre et celui qui dézingue la voiture électrique, le choix des rédactions est vite fait. Au diable la déontologie ! 

La faute à pas de chance… ou pas ! 

Trois journalistes de TF1 sont partis sur le même parcours d’un peu plus de 300 km (autoroute et départementale) au volant de motorisations différentes : un diesel, une hybride essence et une électrique. Inutile d’avoir regardé la vidéo pour deviner que le dernier arrivé, avec (soi-disant) une heure et demie de retard, est le journaliste au volant d’une Volkswagen ID.4. Le malheureux en électrique a forcément galéré pour recharger, comment pouvait-il en être autrement pour faire monter la sauce ?

Extrait du reportage TF1 alors qu'à la borne IECharge les deux autres véhicules du tournage sont présents // Source : Capture flux TF1
Extrait du reportage TF1 alors qu’à la borne IECharge les deux autres véhicules du tournage sont présents // Source : Capture flux TF1

Si certains points négatifs soulevés par le reportage de TF1 pourraient être légitimes (bornes lentes, excentrées ou en panne), le reste essaye quand même de nous faire avaler de sacrées couleuvres. Chers confrères, quand on voit les deux autres véhicules (censés rouler vers la destination) garés à proximité de celui en électrique lorsqu’il tombe sur les méchantes bornes bizarrement sélectionnées, votre histoire perd toute crédibilité, pour le peu qu’elle en avait avant.

Pour ne rien arranger, aucun des chiffres avancés dans ce reportage n’est correct (y compris pour le diesel et l’hybride). On atteint quand même un niveau de reportage au doigt mouillé extrêmement inquiétant pour une diffusion dans un journal de 20h. On partait déjà de loin avec un journaliste qui n’utilise pas le planificateur fourni dans son ID.4, on passe sur le fait que le modèle équipé d’une batterie 77 kWh aurait pu faire le trajet d’une traite aux limitations de vitesse ou avec une très brève recharge de 5 à 10 minutes, mais on a touché le fond lorsque, à 30 % de batterie, le conducteur s’inquiète de ne plus pouvoir aller plus loin. J’ai une pensée compatissante pour Volkswagen qui a prêté l’un de ses véhicules pour obtenir ce triste résultat.

À qui profite le crime ?

Ne vous étonnez pas de ne jamais croiser une Tesla dans l’un de ces reportages, parce que cela met à mal les projets de désinformation ambiante contre les véhicules électriques.

Tesla Model 3 (2023) // Source : Raphaelle Baut pour Numerama
Tesla Model 3 lors de notre dernier essai sans difficulté // Source : Raphaelle Baut pour Numerama

Je cherche désespérément à comprendre quel intérêt trouvent encore les rédactions à passer pour des incompétentes aux yeux de tous les électromobilistes. Ce n’est clairement pas pour sauver leurs annonceurs (constructeurs auto), puisqu’ils ont un besoin vital de vendre des électriques, alors qui tire les ficelles ? Je me demande par ailleurs si la prochaine étape consistera à confier la voiture électrique à un conducteur qui n’a pas encore le permis, histoire de pimenter le tout.

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