Il devient difficile de comprendre l’acharnement de certains contre la voiture électrique. Sans verser dans le cliché inverse, qui consisterait à tout excuser à la voiture électrique, il faut bien admettre que ce qui était peut-être vrai il y a quelques années ne l’est plus forcément aujourd’hui. Les véhicules électriques ont évolué et l’infrastructure de recharge a aussi connu une révolution (même si tout n’est pas parfait). Numerama a donc eu l’idée de condenser une dizaine d’expériences récentes de longs trajets pour en tirer un bilan et des conseils.
Bien que les essais ne soient pas la composante principale de mon activité journalistique, il est toujours intéressant de tester les nouveautés pour comprendre les évolutions du secteur et l’expérience client. Ces essais sont parfois organisés par les marques dans un cadre défini, et d’autres fois, ce sont des véhicules que l’on emprunte librement aux constructeurs pour quelques jours. Le problème : ces véhicules se trouvent à Paris, tandis que j’habite au sud de l’Alsace, à un peu moins de 500 km. Est-ce un frein ? Absolument pas. Ou plutôt, plus maintenant.
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis mon premier essai longue distance avec la Tesla Model S en 2016. Les 2 000 km réalisés en 4 jours à l’époque avaient imposé une certaine gymnastique mentale et provoqué quelques déconvenues. Aujourd’hui, même avec une citadine électrique (un peu polyvalente), il n’y a plus de difficultés.
Une gestion du temps différente selon les voitures électriques
Les trajets longue distance en voiture électrique obligent tout de même à changer quelques habitudes. Les fameux 1 000 km d’autoroute abattus en une traite par certains champions sont à oublier momentanément. Mais, cela changera forcément à l’avenir : les progrès en matière de batteries sont si rapides que cet argument, comme bien d’autres, finira par tomber dans l’oubli. Il faut cependant rappeler qu’il est déconseillé, pour des raisons de sécurité routière, de ne pas faire de pause.
En attendant, la voiture électrique astreint à s’arrêter sur les longs trajets. Sur 480 km, je fais un tiers du trajet sur nationale/départementales et le reste sur autoroute. Certaines voitures auront besoin d’une seule pause charge, tandis que d’autres peuvent nécessiter 3 arrêts. Les conditions météorologiques (vent, froid, pluie) peuvent parfois impliquer de faire une recharge supplémentaire. Le fait de ne pas forcément partir avec la batterie pleine va aussi influencer les charges à effectuer en cours de route, c’est ce qu’il s’est passé sur certains modèles testés.
- 1 arrêt avec la BMW i4 e40, Tesla Model 3 Grande Autonomie, Tesla Model Y Grande Autonomie, Renault Scénic (grande batterie)
- 2 arrêts avec le Peugeot e-3008 (possible en 1), la BYD Seal, Skoda Enyaq 80
- 3 arrêts avec la DS3 E-tense (ou le Peugeot e-3008 quand il me fait une mauvaise blague)
Le Honda e:ny1 a été testé sur un autre trajet de 450 km sur autoroute. Il a nécessité 2 pauses recharges. La nouvelle Mini Cooper a eu besoin d’une grosse recharge pour faire Le Touquet – Paris (260 km) par l’autoroute.
Il faut également préciser que je ne suis pas très adepte du fait de jouer avec les derniers pourcentages de batterie. Je préfère m’arrêter une fois de plus 5 à 10 minutes pour rouler plus sereinement ensuite, surtout si c’est le premier long trajet avec un nouveau véhicule. Le retour est souvent mieux optimisé. C’est très différent lorsque l’on est propriétaire de son propre véhicule électrique depuis un moment. Plusieurs de mes proches sont experts en arrivées à domicile avec 0 % de batterie, sans aucun stress (certaines voitures ont une petite réserve de kilomètres).
Ce que l’on retient essentiellement de ces différents trajets :
- Si faire une pause toutes les 2 heures (ou un peu plus) vous convient, la voiture électrique est probablement faite pour vous.
- Évitez de partir avec une heure d’arrivée précise à respecter, du moins sans une certaine marge de sécurité. Vous risquez de louper l’apéro chez mamie.
- Les débits de recharge ou la courbe de recharge du véhicule mettent parfois nos nerfs à rude épreuve.
- Lorsque l’on parle d’arrêt ou de pause, cela ne signifie pas 1 heure à tuer le temps. D’ailleurs, deux courtes pauses de 15 à 20 minutes sont bien plus bénéfiques qu’une recharge poussée à près de 100 %.
- Une citadine ne pourra jamais atteindre le confort d’une routière sur ces longs trajets. Mais rien n’est impossible tant que l’on peut charger en Combo CCS et que l’on ne court pas après le temps.
- Le modèle, la manière de conduire et les conditions météos font de chaque trajet un trajet unique. Ce que vous avez fait le jour A n’est pas forcément reproductible le jour B.
- Pour gagner du temps sur les pauses, il suffit d’abaisser sa vitesse sur la route. La différence de consommation électrique est notable entre 130 et 120 km/h et les quelques minutes perdues sur la route sont moins pénalisantes qu’à la borne.
Quelques couacs sur ces déplacements longue distance
Évidemment, j’ai rencontré des soucis lors de ces trajets. Mais, mon expérience est bien loin des trajets catastrophiques souvent dépeints dans les grands médias. Deux modèles m’ont donné un peu plus de fil à retordre.
La DS3 E-tense a été le trajet le plus long en durée, et cela aurait probablement été semblable avec toute la gamme Stellantis basée sur la même plateforme technique. Si la voiture est vraiment très agréable au quotidien, cela se gâte un peu sur les grands déplacements. Les consommations élevées à 130 km/h, combinées à une petite batterie de 51 kWh (utilisable) et une courbe de charge assez mauvaise, rendent le trajet plus laborieux. Il n’y a aucun problème à le faire, mais cela prend du temps. Les pauses surviennent plutôt toutes les 1h30, pour 30 minutes de pause (c’est un peu schématique, mais vous avez l’idée). Une solution est de réduire sa vitesse à 120 ou 110 km/h, mais cela ne plaira pas à certains.
La BYD Seal est une bonne berline taillée pour la route. Elle n’a aucun problème pour avaler les kilomètres, cependant le modèle est un peu fâché avec certains types de bornes. Les opérateurs de recharge n’utilisent pas tous les mêmes fabricants de bornes, et parfois la communication fonctionne moins bien sur certaines d’entre elles. Dans ces cas-là, les débits acceptés par la voiture sont bien en dessous de la courbe de charge habituelle et l’attente s’allonge, à moins de se décider à partir charger ailleurs. Hélas, ce côté « roulette russe » est dommageable pour la marque et le modèle. Par contre, c’est typiquement le genre de problèmes qui peuvent être corrigés par une mise à jour à distance (OTA). C’est peut-être même déjà le cas.
Impossible de ne pas finir cette courte liste des couacs rencontrés sur les longs trajets sans parler de Tesla. La marque, pourtant reine des longues distances grâce à son réseau de superchargeurs, a réussi à me décevoir. Lors de l’essai de la Tesla Model 3 Highland, je n’ai pas pu faire pipi (pas de commodités disponibles) pendant la pause recharge. Voilà le scandale que je me devais de partager avec vous (non sans une pointe d’ironie). Plus sérieusement, Tesla a quelques superchargeurs sur les aires d’autoroute. Pourtant, il est fréquent de devoir sortir de l’autoroute pour pouvoir recharger, ce qui peut représenter une perte de temps aux yeux de certains.
Les autres trajets se sont tous bien passés dans l’ensemble. Bien sûr, il a souvent fallu un peu plus de temps que ce que suggéraient les données théoriques des constructeurs. J’ai aussi croisé (trop) régulièrement des bornes en panne sur certains réseaux ou des paiements CB qui ne marchent pas du premier coup. Je n’ai jamais été bloquée ou réellement retardée dans mes trajets pour cela. Tout cela pour dire qu’il ne faut pas se fier qu’aux récits négatifs.
Une voiture électrique coûte-t-elle plus cher qu’une thermique sur les longs trajets ?
Rouler en Tesla est sans aucun doute le moyen le plus facile et abordable d’appréhender les longues distances en électrique. Cela permet de rouler sans avoir à se soucier ni de la recharge, ni de son coût grâce au réseau de Superchargeurs. Pour les autres constructeurs, il est plus difficile de dresser une généralité, l’expérience étant beaucoup plus aléatoire.
Il y a cependant une logique implacable : plus votre voiture électrique aura une grande batterie, plus elle vous coûtera cher à recharger sur autoroute, surtout si elle consomme autant qu’un tank.
Est-ce qu’une voiture électrique vous coutera plus cher qu’un véhicule thermique lors des vacances ? Dans certaines situations, cela sera le cas. Mais cela reste l’exception qui confirme la règle, car sur le reste de l’usage, le véhicule électrique est bien plus intéressant.
Un fait surprenant : il arrive régulièrement que les péages coûtent plus cher que les recharges sur les aires de service (surtout en optimisant correctement les recharges). Dans tous les cas, ce sont les concessionnaires d’autoroutes qui sont les grands gagnants.
Deux exemples récents avec le Honda e:ny1 pour un Paris – La Baule et avec le Renault Scénic sur mon habituel Mulhouse – Paris :
Péages | Recharges | |
---|---|---|
Honda e:Ny1 (aller) | 43,2 € | 30,12 € (2 arrêts) |
Honda e:Ny1 (retour) | 43,2 € | 26,36 € (2 arrêts) |
Total autoroute Honda | 86,4 € | 56,48 € |
Renault Scénic (aller) | 27,1 € | 33,89 € (2 arrêts) |
Renault Scénic (retour) | 24,8 € | 21,32 € (1 arrêt) |
Total autoroute Scénic | 51,9 € | 55,21 € |
Si la voiture électrique vous intéresse, renseignez-vous sur les médias spécialisés et sur les communautés d’utilisateurs de voitures électriques, vous obtiendrez de meilleurs conseils. Ne vous fiez pas au récit d’une expérience malheureuse, d’un média ou d’un conducteur novice, si les débuts apparaissent compliqués, les appréhensions sont rapidement levées.
La charge rapide, et bien d’autres thèmes cruciaux de la mobilité électrique, sont abordés dans notre newsletter hebdomadaire Watt Else. C’est une newsletter gratuite et sans langue de bois.
Les abonnés Numerama+ offrent les ressources nécessaires à la production d’une information de qualité et permettent à Numerama de rester gratuit.
Zéro publicité, fonctions avancées de lecture, articles résumés par l’I.A, contenus exclusifs et plus encore. Découvrez les nombreux avantages de Numerama+.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez-nous sur WhatsApp !