L’hydrogène comme alternative à la voiture électrique à batterie ne met personne d’accord. Alors, quand les patrons de TotalEnergies et de BMW Group s’opposent sur le sujet lors d’une conférence organisée en même temps que le Mondial de l’Auto 2024, cela ne manque pas de piquant.

Au milieu des discours très orientés sur la voiture électrique, l’hydrogène tente toujours quelques incursions dans le débat public. Le patron de BMW Group, Oliver Zipse, a surpris en parlant de cette solution technologique souvent critiquée, le 15 octobre 2024 lors du Paris Automotive Summit. Cette conférence invite les grands patrons de l’industrie automobile à prendre la parole devant un parterre de professionnels de la filière automobile, en parallèle du Mondial de Paris. Interrogé à son tour sur l’hydrogène, Patrick Pouyanné, le patron de TotalEnergies, a adopté un discours diamétralement opposé à celui d’Oliver Zipse.

Numerama a assisté à cette matinée de conférence. Cette petite joute entre les grands patrons n’a pas manqué d’apporter un peu d’animation parmi les échanges très policés de la matinée.

L’hydrogène : une alternative réelle à la voiture électrique ?

Certains opposants à la voiture électrique à batterie ont tendance à voir dans la voiture à hydrogène une solution technologique alternative. Il n’y a cependant pas que les opposants aux véhicules électriques (VE) qui attendent toujours l’heure de gloire de l’hydrogène. Le constructeur japonais Toyota est l’un des plus fervents défenseurs de cette alternative, même si la solution actuelle est encore plus chère que l’électrique. BMW s’est aussi allié à Toyota pour produire, à partir de 2028, des véhicules de tourisme équipés de piles à combustible (FCEV) fonctionnant à l’hydrogène.

Oliver Zipse a donc profité de sa prise de parole devant la filière automobile pour promouvoir l’hydrogène comme autre solution neutre en carbone pour l’échéance de 2035. Le patron de BMW considère que « le 100 % électrique en Europe est impossible », citant notamment les problèmes de dépendance à la Chine pour la batterie, mais aussi l’infrastructure de recharge trop imparfaite.

L’hydrogène est pourtant loin d’être la réponse parfaite, et le patron de TotalEnergies l’a rappelé quelques minutes après.

Hopium Machina - berline de luxe à hydrogène - lors du Mondial de Paris 2022 // Source : Raphaelle Baut
Hopium Machina à hydrogène au Mondial de Paris 2022, projet depuis abandonné. // Source : Raphaelle Baut

Un rendement catastrophique

 « L’Europe n’a pas le choix de passer à la voiture électrique [ndlr : à batterie] » a répondu Patrick Pouyanné, presque offusqué par les propos tenus par le patron de BMW. Pour lui, l’hydrogène ne sera qu’un marché de niche, il n’y a aucune chance pour que cette solution s’adresse à un marché de masse. Le chef d’entreprise a notamment pointé du doigt le problème de rendement de l’hydrogène : « Un rendement de seulement 35 %, contre plus de 85 % pour les voitures électriques. » L’hydrogène a trop d’étapes de transformation et de déperdition pour que cela puisse être rentable pour des véhicules particuliers.

D’ailleurs, il ne voit pas non plus d’opportunités pour cette solution dans le transport routier, qui passera selon lui également à l’électrique. En plus du rendement, Patrick Pouyanné a rappelé que le processus de fabrication de l’hydrogène vert, ainsi que son transport jusqu’aux stations, n’est pas plus vert que la fabrication des batteries des voitures électriques. Qu’il s’agit, en quelque sorte, d’un faux débat.

Pas d’hydrogène chez Total

Pour achever de convaincre l’auditoire de son opposition à l’hydrogène, il a précisé qu’il ne compte pas installer de stations hydrogène dans son réseau de stations-service : « Une station hydrogène coûte plusieurs millions pour être installée, c’est bien trop cher. » Il a préféré investir dans le développement du réseau de recharge électrique, même si tout n’a pas été sans quelques couacs dans les stations TotalEnergie.

Une station de recharge pour les véhicules à hydrogène à Moutiers, en France.
Une station de recharge pour les véhicules à hydrogène à Moutiers, en France. // Source : Hympulsion

De plus, le spécialiste de l’énergie n’est pas favorable au développement des e-fuels, qu’il considère comme « une solution réservée à quelques propriétaires de Ferrari ou de Porsche ». Il a souligné un coût 10 fois plus cher que l’essence. Il a rappellé qu’au moment du passage du carburant à 2 €/litre, la France était à feu et à sang, et qu’avec un carburant à 10 €/litre, cela mènerait à une véritable révolution populaire.

D’ailleurs, Patrick Pouyanné a confié avoir deux véhicules électriques (sans en préciser la marque) et en être très satisfait.

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