Il n’y a jamais eu autant de bornes de recharge à disposition des conducteurs de voitures branchées. En 2024, on comptait plus de 150 000 points ouverts au public en France. Pourtant, la charge hors de chez soi reste une des principales préoccupations des indécis. À tort ou à raison ?

L’écrasante majorité des conducteurs de voitures électriques rechargent à la maison, et n’utilisent que peu les bornes de recharge publiques. Cela ne veut pas dire que ce n’est pas un point important, bien au contraire. Ne serait-ce que pour se rassurer avant de sauter le pas de l’électrique, savoir qu’il existe de quoi se charger à peu près partout est nécessaire.

L’Avere affirmait fin novembre 2024 qu’il y a au moins 152 000 points de recharge ouverts au public sur le territoire national : c’est beaucoup. Un an plus tôt, il n’y en avait même pas 115 000. Cela montre que les différents opérateurs jouent bien le jeu et continuent à multiplier les bornes un peu partout.

Cependant, malgré ces progrès en termes de nombre de bornes, beaucoup de conducteurs continuent de rencontrer des problèmes. Fiabilité, disponibilité, facilité à démarrer une recharge… Ou tout simplement, comment trouver une borne adaptée à sa voiture et à son besoin ? Ce sont autant de questions auxquelles il est souvent difficile de répondre à l’heure actuelle. Comment assurer le futur de la mobilité électrique sans que la recharge hors de chez soi soit un souci ?

Une infrastructure de recharge au service du conducteur

À titre personnel, j’ai connu la mobilité électrique bien différente de ce qu’elle est aujourd’hui. J’ai eu ma première voiture électrique en 2017. À cette époque, traverser la France n’était pas un simple trajet à planifier, mais un périple dans lequel il fallait des plans A, B et C pour chaque étape. Depuis, rouler en électrique signifie toujours être conscient qu’il faudra se charger, mais le problème n’est plus du tout le même.

Si l’on considère les grands axes autoroutiers, on trouve désormais aisément de quoi se charger rapidement tous les 60 km. En réalité, il ne s’agit plus de se demander si l’on trouvera de quoi se charger sur la route, puisque Ionity, Fastned, Totalenergies et consorts ont mis les bouchées doubles pour s’implanter un peu partout.

Tesla en pause supercharge  // Source : Tesla
Tesla en pause supercharge. // Source : Tesla

La fiabilité est aussi bien meilleure, même s’il reste toujours des cas de bornes en panne. Il est toutefois extrêmement rare d’arriver à une station dans laquelle toutes les bornes sont hors service. Ce qu’il l’est moins est de découvrir qu’une ou deux bornes ne fonctionnent pas. Cependant, ce n’est pas problématique, en dehors des quelques grands week-ends de chassé-croisé, où les stations sont le plus utilisées. C’est loin d’être simplement une impression : en mai 2023, l’Avere annonçait un taux de disponibilité des bornes de recharge rapide de 77 %, contre 96,1 % en novembre 2024.

Enfin, on peut saluer le début de l’intégration des bornes dans les planificateurs d’itinéraires, ce qui était encore extrêmement rare il y a quelque temps. Outre Tesla, qui possède son réseau depuis toujours, les autres constructeurs ont commencé à s’intéresser sérieusement aux grands trajets. On peut ainsi citer Renault, Volvo, Hyundai ou Mercedes qui intègrent correctement des arrêts de recharge lorsqu’on met une destination qui n’est pas atteignable avec l’autonomie restante dans la voiture. Pour tous les véhicules qui offrent Apple CarPlay et Android Auto, on peut même utiliser des applications spécialisées comme Chargemap ou A Better Route Planner, même si ces deux options sont plutôt réservées à un public plus aguerri.

Mais des limites qui restent frustrantes

Si le cas des grands axes est plus ou moins réglé, ce n’est pas le cas des zones rurales et des villes, qui manquent encore cruellement d’offre en grand nombre, et adaptées à la mobilité électrique. À titre d’exemple, on peut s’étonner que les parkings relais des villes ne soient pas dotés de centaines de prises. Cela surprend, à l’heure où l’on incite à rouler en électrique plutôt qu’en thermique pour venir jusqu’à l’entrée des villes, puis à y laisser la voiture pour privilégier les transports en commun. Il serait pertinent que la plupart des places disposent de quoi se charger, pour éviter de voir toujours les 5 mêmes voitures ventouses toute une semaine.

Les prix des voitures électriques en occasion ont chuté en 2024. // Source : Pixabay @Stivabc
Zoé en charge. // Source : Pixabay @Stivabc

En ville, c’est un combat similaire, avec encore trop peu de bornes de recharge lentes, compte tenu de l’accroissement du parc électrique roulant. On retrouve souvent une ou deux bornes sur certains parkings au centre des villes, là où des dizaines de voitures électriques aimeraient se brancher. C’est d’ailleurs bien plus pertinent en ville, là où les garages privés sont rares, qu’en campagne où toutes les maisons ont plus facilement de quoi recharger leur voiture la nuit.

Tesla a bien tenté de résoudre en partie ce souci, en implantant ses Superchargeurs en dehors des autoroutes pour qu’ils soient accessibles sans pour autant avoir à payer le trajet, et en ouvrant les Superchargeurs à toutes les marques. Cependant, cette charge rapide n’est pas adaptée à quelqu’un qui laisserait sa voiture une journée complète, et est donc à réserver aux besoins en grands trajets, ou bien pendant que l’on fait quelques courses durant une petite heure.

Si la fiabilité en hausse des grands opérateurs est à souligner, on ne peut pas en dire autant des multiples opérateurs nationaux, régionaux, départementaux que l’on trouve ici et là. Entre des bornes qui supportent mal les aléas de la météo, des câbles qui se retrouvent bloqués, des méthodes de paiement non fonctionnelles ou des charges qui ne démarrent jamais, vous avez le choix. Tout ceci existe malheureusement toujours en 2025 : les opérateurs locaux délaissent la maintenance de leur infrastructure bien trop fréquemment.

On pourrait encore ajouter à la liste des frustrations les bornes vieillissantes, parfois dotées de câbles qui n’ont plus lieu d’être — comme le CHAdeMO qui était cher à Nissan —, et qui n’existent plus que pour embrouiller les nouveaux venus dans la mobilité électrique. Si les aficionados manient les termes AC, DC, CCS ou Type 2 à merveille, sachant parfaitement quand ils ont besoin de charge à 350 kW en 800 Volts ou de charge en courant alternatif à 7 kW, ce n’est pas le cas des néophytes. Ils ont souvent derrière eux toute une vie en voiture thermique, dans laquelle faire le plein n’a jamais été une source d’inquiétude. Il faut pouvoir plus facilement répondre à la question : où vais-je me charger, et à quelle puissance ?

Pour que la charge hors de chez soi ne soit plus un casse-tête : les améliorations qu’on attend

Pour que la charge ne devienne pas une jungle dans laquelle il est impossible de s’y retrouver, le premier travail doit être mené sur la tarification. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la disparité des tarifs participe au flou artistique général de la charge en itinérance : impossible de savoir ce que ça va coûter a priori, sauf si on prévoit ses arrêts et que l’on a vérifié le prix en amont. Bref, c’est une solution bancale, qui n’a aucun rapport avec l’expérience que connaissent les conducteurs de voiture thermique depuis toujours. La tarification doit être transparente, aisément consultable et surtout plus homogène entre les opérateurs.

Les planificateurs de trajets devraient toujours afficher les prix des bornes qu’ils proposent, avec une estimation du coût total pour la recharge. Toutes les données existent, il suffit de les exploiter : si ma batterie fait 60 kWh, que je dois recharger de 10 à 60 %, et que le kWh est à 40 centimes, alors le planificateur devrait me dire que la charge coûtera 12 euros dans cette station. En 2025, exiger ce genre d’informations n’est pas déraisonnable.

Le Plug & Charge devrait être la règle, et toute autre manière de charger, une exception. Tesla a compris ce souci il y a plus de 10 ans, et les conducteurs de Tesla ne cesseront de vous le répéter : aux Superchargeurs, on se gare, on se branche, et ça charge. C’est un avantage indéniable face aux autres stations où le Plug & Charge n’est que trop rare. Qui n’est jamais arrivé à une borne, et a cherché où était le lecteur de carte RFID, s’il y avait un QR code à scanner ou encore si l’on pouvait payer par carte bancaire ? Avec une démocratisation du Plug & Charge chez tous les opérateurs, il n’y aurait qu’à créer un compte une fois, ajouter un moyen de paiement et donner les informations de sa voiture pour que chaque charge future soit un jeu d’enfant.

Pour les bornes qui ne permettraient pas le Plug & Charge, le paiement par carte bancaire sans contact doit être permis. Depuis plus d’une décennie, les conducteurs de voiture électrique doivent jongler soit avec des dizaines de cartes d’opérateurs exotiques, soit utiliser une carte comme le Chargemap Pass ou le badge Shell Recharge. Cela assure certes de se recharger partout, mais avec une tarification encore plus opaque. Ce n’est pas tenable.

Enfin, il faut à la fois améliorer la fiabilité des bornes (en particulier les bornes des villes laissées à l’abandon). Leur état en temps réel doit aisément être consultable. Arriver à une borne sans savoir si elle est en service, occupée, ni connaître sa puissance d’avance n’est plus acceptable.

Comme vous l’aurez constaté, le reste à faire est conséquent pour que la mobilité électrique soit aussi simple hors de chez soi qu’à la maison. Les préoccupations des électromobilistes en devenir sont souvent exagérées, mais légitimes dans le fond : des bornes fiables, auxquelles le tarif est clair et sans surprise, avec une intégration correcte dans les planificateurs, ne doivent pas être un rêve. En 2025, c’est une nécessité.

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