« 94 % d’Allemands contre Tesla », puis l’inverse : la guerre d’influence derrière un sondage manipulé

Un sondage publié le 11 mars par le site allemand T-Online affirmait que 94 % des votants ne rachèteraient plus de Tesla. Une statistique explosive qui a été reprise par les médias profitant des polémiques actuelles autour de Tesla et de son patron. Il faut dire que le résultat de ce vote réunissant déjà 100 000 votants semblait indiscutable.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. En quelques jours, le vote a été littéralement retourné, sous l’influence massive de fans de la marque et de bots, jusqu’à afficher un résultat complètement inversé. Et devinez qui a relayé cette version de l’histoire sur X (ex-Twitter) ? Elon Musk, comme l’a remarqué Electrek.

Un sondage bancal… pour tous les camps

Au départ, ce sondage n’était déjà pas d’une fiabilité exemplaire. Pas de contrôle sur les votants, pas de limite géographique, pas de limite de vote : il s’agissait d’un simple formulaire ouvert à quiconque passe sur le site. Résultat ? Un chiffre choc : 94 % d’avis négatifs sur 100 000 votants, aussitôt brandi comme une preuve du désamour des Allemands pour Tesla. Sauf que dans un univers polarisé comme celui des véhicules électriques, un tel chiffre aurait déjà dû mettre la puce à l’oreille. Il aurait dû être repris avec prudence par les médias, ou ne pas forcément être repris tout court.

Face à cette vague de critiques, le message a atteint également les plus fidèles soutiens de Tesla, qui ont organisé la riposte. Ainsi, depuis la reprise par différents médias les jours suivants, les votes se sont inversés. Le changement n’a pas été progressif, environ 360 000 votes sont venus inverser la tendance. T-Online a d’ailleurs fermé le sondage après avoir détecté que « 253 000 des votes exprimés proviennent de seulement deux adresses IP aux États-Unis. » Un tel résultat ne pouvait pas être uniquement l’œuvre des soutiens de la marque, il était évident que des bots avaient truqué le résultat.

Désormais, 70 % des votants se disent prêts à racheter une Tesla. Point d’orgue de cette mascarade : Elon Musk n’a pas hésité à relayer sur X un message présentant ce « nouveau résultat », alors qu’il était resté silencieux face aux 94 % contre. Il attendait que l’histoire soit réécrite en sa faveur.

Une bonne leçon

Cet épisode pourrait devenir un cas d’école. Il illustre à quel point les sondages en ligne sont de véritables terrains de jeu pour la désinformation et les guerres d’influence. Tesla a-t-elle perdu des clients ? Probablement. Est-ce un raz de marée de mécontents ? Impossible à dire sur la base de ce sondage qui aurait pu être manipulé dès son lancement par des opposants (très actifs) de Tesla.

Un simple formulaire, sans contrôle, ne devrait pas être considéré comme une source, mais seulement comme un élément d’illustration. Même les études réalisées par des instituts de sondage sur des panels (plus ou moins) qualifiés sont souvent à prendre avec des pincettes.

On retiendra quand même de cette affaire qu’Elon Musk a su parfaitement tirer parti d’une information manipulée. En repartageant la publication d’un investisseur et fan Tesla qui ne parlait que du nouveau résultat du sondage en faveur d’Elon (70 %), Elon Musk a quelque peu réécrit l’histoire qu’il a diffusé à des millions d’abonnés (favorisé par l’algorithme de sa plateforme). L’homme d’affaires n’a même pas besoin d’indiquer que les médias ont menti auparavant, les fans feront d’eux-mêmes ce raccourci, sans chercher à savoir où est le vrai du faux.

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