C’est peu dire qu’en Europe, la Tesla Model 3 était attendue. Le 28 juillet 2017, le constructeur américain a levé le voile sur sa troisième voiture grand public, pilier de la troisième phase de sa stratégie électrique. Le mercredi 13 février 2019, presque deux ans après, nous avons pu la prendre en main pendant cinq heures sur les routes au nord de l’Île-de-France, après un premier essai anticipé en Californie dans un véhicule américain.
Si ce véhicule est si important pour Tesla, c’est parce qu’il permet à l’entreprise d’Elon Musk de passer au stade de l’industrialisation. Le premier Roadster était une preuve de concept qui a servi à créer le duo Model S et Model X. Ces deux véhicules haut de gamme représentaient la phase deux : créer des voitures électriques grand public onéreuses, mais débarrassées des contraintes d’autonomie et autant capables de procurer de bonnes sensations au volant que de préparer la conduite autonome de demain.
La Model 3, qu’on dit parfois entrée de gamme à tort, sait utiliser ce savoir acquis sur les précédents véhicules pour proposer un engin plus petit et moins onéreux — même la version la plus puissante, seule disponible aujourd’hui à la vente, s’affiche entre 53 500 et 70 000 € toutes options. La promesse, c’est d’arriver à proposer à terme un véhicule à 35 000 € et d’enchaîner sereinement sur le SUV nommé Model Y, conçu sur la même plateforme technologique.
Le résultat est-il à la mesure des attentes ? En réalité, la Model 3 les dépasse. Toutes.
Cet article est le premier d’une série autour de la nouvelle berline de Tesla. Il sera complété de vidéos, de comparatifs et d’un essai longue durée.
Test drive
Pour cette première prise en main européenne, Tesla nous a mis dans les mains un véhicule dont la seule option était la couleur rouge. Pas d’Autopilote sur cette Model 3 : il ne change pas par rapport à celui présent sur les Model S et Model X, qui embarquent strictement le même matériel et le même logiciel. L’idée, cette fois, c’était avant tout de conduire cette version Dual Motors de la petite berline. Et ce serait criminel d’entamer cette prise en main par un autre sujet que la conduite.
Quelle claque ! Nous connaissons la conduite Tesla depuis 2016 maintenant et nous avons testé à peu près toutes les déclinaisons des Model S et Model X. C’est donc avec une joie non dissimulée que nous retrouvons sur ce modèle moins onéreux toute la saveur de la conduite électrique sublimée par le constructeur. À la moindre pression sur la pédale, en mode Sport, on sent que les moteurs sont prêts à s’enclencher et à proposer cette accélération bluffante qui scotche au siège et procure un plaisir de conduite à chaque fois renouvelé. Même pas besoin de conduire en-dehors des limites de la loi : la sensation procurée par le 0 à 80 km/h sur les routes françaises est inimitable.
Plus encore : on a l’impression qui peut être étrange pour qui a l’habitude de juger différents modèles d’une gamme par rapport à leur prix que la Model 3 est plus agréable qu’une Model S. Plus petite, moins large, moins longue, moins électronique (le coffre s’ouvre à la main, les poignées ne surgissent pas etc.). Plus humaine, en somme, mais toujours aussi confortable. Cela dit tous ces petits détails ne seraient rien sans le clou du spectacle, qui fait de la Model 3 une expérience vraiment hors du commun : l’absence de tableau de bord.
C’était un choix osé de Tesla, mais le résultat en conduite est incroyable : derrière le volant, aucune donnée ne vient capter le regard. Tesla a tout simplement évacué l’un des points historiques de la voiture pour réinventer son intérieur autour d’un écran horizontal en position centrale, qui fait à la fois office d’infodivertissement et de compagnon de conduite. C’est ici que l’on voit la vitesse, toujours affichée dans un coin du champ de vision et qu’on ne cherche plus devant soi après seulement quelques minutes.
Mais toute la différence ne se situe pas réellement sur ce que l’écran permet : elle est plutôt au niveau de ce qu’il enlève. Conduire un véhicule si réactif, si puissant et si silencieux avec simplement une barre de bois, un pare-brise panoramique et le silence devant soi donne une petite vision du futur. La disposition au volant change radicalement la manière dont on apprécie la conduite et c’est d’autant plus efficace que le tableau de bord de la Model 3 est absolument épuré : deux commandes sous les pouces, une commande de warnings en hauteur et trois commodos. Même l’Autopilote a été déporté sur le commodo qui sert au démarrage.
En bref, s’il y avait un pied de nez à faire aux constructeurs bien en place qui estiment que Tesla veut tuer la conduite avec son Autopilote, c’était bien celui-là : même avec des Model S et X qui ont bluffé jusqu’aux plus réactionnaires des critiques auto, la Model 3 prend encore une longueur d’avance et réinvente la conduite Tesla. Même en mode confort et dans une conduite douce et mesurée, la Model 3 propose une expérience de route inégalée. Et quand on pouvait bien voir qu’une I-Pace de Jaguar égalait sans mal la Model S dans sa catégorie, on se demande bien comment l’industrie va réagir à une Model 3 qui change encore leurs paradigmes.
Le smartphone avec des roues
Si l’on sort du véhicule, car il faut bien faire des pauses, c’est uniquement pour voir comment Tesla a fait des économies sans sacrifier ses exigences. Nous l’avons déjà noté : la plupart des fonctionnalités annexes du véhicule sont manuelles (les deux immenses coffres à l’avant et à l’arrière, les portes…), mais tout garde un souci du détail. Par exemple, le coffre s’ouvre presque à 90 degrés, facilitant le chargement à l’horizontale. C’est une petite voiture, mais elle saura accommoder des familles avec deux ou trois enfants.
Quand on tourne autour, on relève quelques détails : la prise à l’arrière, par exemple, nativement européenne désormais. Cela permet de se connecter sur à peu près n’importe quelle borne sans adaptateur. Nous avons ainsi pu nous recharger complètement par hasard sur la borne d’un restaurant et supermarché bio qui ne figurait pas sur la carte. Le gérant y chargeait sa Zoé et en un changement de prise, c’était à notre tour. On sent que la Model 3 a été plus pensée pour l’Europe que ses grandes sœurs — au-delà même du gabarit qui nous a permis de circuler dans de petits villages de bords de Seine sans le moindre problème.
Sur la carrosserie, rien n’indique qu’il s’agit d’une Model 3, tout juste l’impression apparaît-elle sur le marchepied. À l’arrière, la version Performance, plus sportive, que nous conduisons, se distingue par un Dual Motors souligné — la version grande autonomie n’a pas cette subtilité.
En rentrant, on voit que Tesla a progressé sur les finitions intérieures : les matériaux s’accordent bien, les modules de rangement sont nombreux et toutes les commandes, électriques, sont accessibles soit sur des boutons (les sièges) soit sur l’écran. On regrettera simplement la position absurde des ports pour connecter son smartphone Android ou iOS (USB-C, Lightning ou les deux au choix) : difficile de les mettre avec une coque et les enlever demande trop de force, ce qui finit par les faire taper sur le haut du bloc.
Climatisation et chauffage sortent directement de conduites sous l’immense panneau de bois et se contrôlent dans des mouvements fluides sur un panneau numérique directement sur l’écran. On ajuste à l’angle près les conduites d’air pour choisir l’intensité et où on souhaite les recevoir. Petit effet garanti.
Cet écran qui donne toute son innovation à la conduite sert aussi d’information sur le véhicule. On y trouve pêle-mêle le GPS, mais aussi les easter eggs, les réglages du véhicule ou l’accès à la musique. Nous avons l’impression, au toucher, qu’il est encore plus réactif que celui installé dans les Model S et Model X, rendant le système d’exploitation maison encore plus simple d’accès — oui, on a enfin l’impression d’avoir une tablette tactile haut de gamme sous les doigts. Et si on craignait qu’il bouge à la moindre pression, protubérant comme il est, les peurs s’éloignent très vite : à la pression aux doigts, il est si bien fixé qu’il n’oscille même pas.
Dès lors, entre la conduite incomparable, les dimensions européennes, le minimalisme de l’intérieur, le confort de l’ensemble, l’autonomie (on parle quand même de plus de 500 km WLTP) et le réseau de charge, on en vient à une conclusion : et si la Model 3, à la moitié du prix d’une Model S toute équipée, n’était pas la Tesla ultime ?
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