Contrairement à Tesla, Ford veut nous faire lâcher le volant. Dans une vidéo publiée le 14 avril, le constructeur américain présente la future mise à jour de ses assistances au pilotage. Baptisée BlueCruise et attendue pour cette année sur le Mustang Mach-E et le pickup F-150, il s’agit d’une technologie de conduite autonome de niveau 2. Et Ford entend franchir un palier : sur certaines portions d’autoroute, il sera possible de lâcher le volant et laisser la voiture opérer seule. Cette avancée interroge sur la sécurité alors que Tesla, dont l’Autopilot est aujourd’hui très perfectionné, martèle qu’il est nécessaire de garder constamment les mains sur le volant.
« BlueCruise est une technologie d’assistances avec de la conduite autonome de niveau 2, similaire à l’Autopilot mais avec l’avantage de proposer une expérience de conduite sans les mains », indique Ford, qui n’hésite pas à se comparer à Tesla. Alors que le fait de garder les mains sur le volant est un volet de sécurité pour s’assurer que le conducteur est toujours vigilant, BlueCruise s’appuie sur un autre système pour surveiller son attention (une caméra qui s’assure que les yeux sont bien tournés vers la route).
Ford rêve de la conduite sans les mains
Sur le papier, rien n’empêche de lâcher les mains à partir du moment où la technologie est sans faille et garantit une conduite sûre et agréable (pas trop brusque). On peut confirmer que c’est le cas de Ford. Lors de notre essai du Mustang Mach-E, nous avons pu tester ses capacités de conduite semi-autonome (réunies sous le système Co-Pilot360). Sur une voie rapide, il est possible de laisser le SUV se charger du trajet, en associant le régulateur de vitesse adaptatif (qui gère l’allure en fonction du trafic voire des panneaux) et le maintien de la trajectoire (qui permet de bien se placer dans la voie).
Quand ces deux fonctions sont activées, on enlève son pied de la pédale d’accélération et l’on n’a plus besoin d’agir sur le volant. Dès lors, on peut très bien s’imaginer le lâcher. Aujourd’hui, il n’est pas possible de le faire : au bout d’une dizaine de secondes, la voiture lance une notification qui intime au conducteur de remettre ses mains sur le volant. L’expérience est similaire chez Tesla, sachant que son Autopilot est capable de dépasser des voitures (il suggère les changements de voie, à valider avec un coup de clignotant).
Pour rassurer les conducteurs, Ford indique avoir éprouvé sa technologie pendant 62 jours, au sein de 37 états américains et 5 provinces canadiennes.
Que dit la législation en France ?
À la date du 15 avril, aucun communiqué de presse présentant BlueCruise n’a été publié sur le portail de Ford. Il faut dire que la loi n’est pas conçue pour autoriser la conduite sans les mains. À ce sujet, l’article R412-6 du Code de la route stipule : « Tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur (…). Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d’exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent. Ses possibilités de mouvement et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ou par l’apposition d’objets non transparents sur les vitres. »
La conduite sans les mains ne permet pas d’assurer des manœuvres « sans délai », même si cette formulation peut être sujette à interprétations. Par conséquent, la technologie de Ford ne semble pas compatible avec la législation française, qui sanctionne ce type de conduite par une amende de classe 2 (35 €). En prime, conduire sans les mains peut amener à des situations susceptibles d’aboutir à des contraventions plus graves (perte de points). Au hasard : tenir son téléphone dans les mains, comme rappelé par le texte R412-6-2 (« Le fait de placer dans le champ de vision du conducteur d’un véhicule en circulation un appareil en fonctionnement doté d’un écran et ne constituant pas une aide à la conduite ou à la navigation est interdit »).
On rappelle enfin que l’Europe n’a pas hésité à brider l’Autopilot de Tesla. Aux États-Unis, la législation est beaucoup plus laxiste, surtout en matière de conduite autonome.
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