Surtout évoquée pour ses usages grand public, la 5G devrait en fait s’avérer décisive dans l’industrie et le transport, grâce à des débits et des temps de latence bien meilleurs aux réseaux sans fil courants. Automatisation, pilotage à distance, robotique, transport intelligent… les domaines dans lesquels l’ultra haut débit mobile va pouvoir se déployer et changer la donne sont nombreux.
La SNCF n’ignore pas les perspectives que la 5G offre : il s’avère que l’entreprise ferroviaire est engagée sur ce créneau depuis 2019. À l’époque, deux expérimentations, l’une avec Bouygues Telecom à la gare de Lyon Part-Dieu, l’autre avec Orange et Nokia à la gare de Rennes, avaient été retenues, parmi onze projets pour évaluer la 5G et plus particulièrement l’une de ses facettes : la fréquence 26 GHz.
Des bandes millimétriques
Parmi toutes les fréquences qui sont prévues pour la 5G à court et moyen terme (3,5 GHz, 700 MHz, 800 MHz, 2,1 GHz, etc.), la bande 26 GHz est la plus atypique, car c’est celle qui est la plus éloignée dans le spectre. D’ailleurs, elle se trouve dans une catégorie appelée « ondes millimétriques », parce que l’écart entre deux crêtes est à une échelle millimétrique, et non pas centimétrique pour les autres.
Si les spécificités des ondes millimétriques, qui débutent à partir de la bande 24 GHz, sont si spectaculaires, pourquoi alors ne pas déployer la 5G directement avec la bande 26 GHz ? Parce que ses autres caractéristiques sont moins séduisantes : en effet, cette bande a une portée faible et pénètre mal dans les bâtiments. Elle est de fait moins pertinente pour couvrir tout un pays.
« La bande 26 GHz, à ce jour la bande la plus élevée jamais utilisée en technologie cellulaire, sera la clé du très haut débit de ‘la fibre sans fil’ que promet la 5G. Sa capacité de pénétration des bâtiments est en revanche très faible et sa portée limitée », expliquait à ce sujet l’Agence nationale des fréquences. C’est pour ça que d’autres bandes sont mobilisées. L’usage de la bande 26 GHz est en fait très situationnel.
C’est donc spécifiquement sur cette bande de fréquences que la SNCF, en partenariat avec Orange, Nokia et Institut Mines-Telecom, entend se focaliser : il a été annoncé le 2 juillet la mise en place de plateformes destinées à prolonger les tests 5G menés à la gare de Rennes, dans deux technicentres rennais (des structures qui servent à la SNCF pour la maintenance de son matériel roulant),
Les expérimentations conduites ici étaient de deux ordres : une amélioration des débits pour les passagers, via des hotspots disséminés dans la gare, afin d’améliorer leur confort, notamment dans l’attente de leur train, et aussi le développement des outils métiers au profit des agents de la SNCF. Il était alors question de formation en réalité augmentée, de maintenance à distance et de pilotage des trains.
Une bande 5G pour le pilotage des trains
La bande 26 GHz présente en effet des caractéristiques très intéressantes. La description qu’en fait le régulateur français des télécoms est d’ailleurs éloquente : cette bande doit « permettre des débits inégalés et des usages inédits ». L’opérateur historique, Orange, est lui aussi dithyrambique : il souligne que cette bande permettrait d’atteindre « des débits équivalents à ceux d’une fibre optique ».
Dans ces conditions, on comprend pourquoi la SNCF regarde de près les fréquences 26 GHz. En 2019, l’Autorité de régulation des communications électroniques évoquait parmi les autres perspectives le traitement massif de données de pilotage des trains. S’il n’était pas fait mention de pilotage automatique ou autonome, on sait que la SNCF regarde dans cette direction. Des premiers engins pourraient rouler dès 2023.
Qu’ils soient autonomes, automatiques ou même téléguidés, ces trains auront besoin d’une connectivité très importante, à la fois pour transmettre de gros volumes de données, dans des délais extrêmement courts. Il faudra par ailleurs s’assurer de la robustesse et de la fiabilité du signal, pour éviter les problèmes d’interférence, d’engorgement du signal et d’interruption lorsque le train est en déplacement.
L’annonce faite début juillet par Orange, la SNCF, Nokia et Institut Mines-Telecom se veut toutefois plus modeste, du moins à court terme.
Dans un premier temps, dit l’opérateur, les besoins et usages industriels identifiés incluent le contrôle procédé, le téléguidage de charriots logistiques, le déchargement de données d’exploitation, l’utilisation de caméras nomades pour suivre les mouvements des matériels ou encore l’analyse de vidéos en temps réel pour détecter des graffitis ou des trappes laissées ouvertes après un cycle de maintenance.
À plus long terme, la bande 26 GHz pourrait se voir confier d’autres missions au sein de la SNCF afin de « soutenir la modernisation et accélérer le passage au très haut débit sans fil des entités industrielles du groupe SNCF ». Dans tous les cas de figure, l’emploi de la bande 26 GHz s’inscrit dans un horizon lointain. L’attribution des fréquences entre les opérateurs pour les ondes millimétriques n’est pas encore sur la table.
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