On aurait eu envie de dire que le point de non retour vient tout juste d’être atteint dans le conflit qui oppose Adobe et Apple autour de la technologie Flash. En réalité, il semble qu’il l’ait été depuis bien longtemps et que seul Adobe pensait encore pouvoir faire infléchir la position d’Apple sur ce sujet. Devant l’intransigeance de la firme de Cupertino, et à moins d’un jugement favorable en cas de procès, Adobe a préféré jeter l’éponge et ne plus perdre son temps avec affaire.

Sans surprise, c’est la modification de la clause 3.3.1 de l’iPhone Developer Program License Agreement (.pdf) qui est à l’origine de cette décision. Mise à jour à l’occasion de la présentation de l’iPhone O.S. 4, celle-ci exige désormais que les programmeurs s’appuient sur une liste blanche de langages autorisés pour concevoir leurs applications. Ainsi, seules les applications écrites dès le départ en C, C++ et Objective-C (ainsi que le JavaScript exécuté par le moteur WebKit) seront acceptées sur l’App Store.

Pour Adobe, qui misait sur son Flash CS 5 pour louvoyer entre les restrictions mises en place par Apple, c’est un brutal coup d’arrêt. Son outil, qui permettait de compiler des applications écrites en Flash destinées à d’autres plates-formes (comme l’iPhone), est obsolète. Pourtant, l’outil était à première vue fort pratique. En quelques clics, un développeur pouvait adapter une application écrite en Flash à n’importe quel environnement : iPhone, iPad, iPod Touch, Android, Windows Mobile ou encore Blackberry.

Certes, cette fonctionnalité aurait à terme entrainé quelques problèmes de monopole. En proposant un outil capable d’adapter une application aux principales plates-formes disponibles, Adobe escomptait bien devenir incontournable et se poser comme nouveau standard dans les applications mobiles. Mais jamais Apple n’a cédé un seul pouce de terrain. Forcément, Apple étant le leader en matière de smartphone, (et sans doute bientôt dans le domaine des tablettes tactiles) la firme veut conserver sa position en continuant sa politique d’exclusivité. Pour profiter des applications et des jeux disponibles sur l’App Store, il est essentiel de posséder un environnement Apple (qu’il s’appelle iPhone, iPod Touch ou iPad).

Dans un billet de blog, Mike Chambers, le responsable en charge des relations avec les développeurs Flash, regrette tout de même cet état de fait. Selon lui, aucune raison technique ne permet de justifier un tel blocage. C’est donc une simple décision idéologique d’Apple, qui ne repose sur rien. Mais qu’importe. Ce marché ne se limite définitivement pas à Apple. Désormais, la firme de San José va concentrer toutes ses ressources sur la plate-forme Android.

Google, qui est également en froid avec Apple, est d’ailleurs bien moins réticent à la technologie Flash. Google et Adobe « travaillent main dans la main pour apporter Flash Player 10.1 et Adobe AIR 2.0 pour les téléphones Android » a expliqué Mike Chambers. Cet épisode met donc probablement fin à la saga du Flash sur Apple. De toute façon, les jeux étaient manifestement faits en début d’année, lorsque Steve Jobs lança une phrase assassine à l’égard de cette technologie : « quand un Mac plante, la plupart du temps, c’est à cause de Flash. Personne n’utilisera plus le Flash. Le monde bouge vers le HTML5« .

« Nous allons conserver la possibilité de cibler l’iPhone et l’iPad avec Flash CS 5. Cependant, nous ne souhaitons plus mobiliser de moyens pour ces technologies dans un futur proche » a expliqué Mike Chambers, qui en a profité pour conspuer la politique d’Apple en matière de validation des contenus. « Si vous voulez développer pour l’iPhone, vous devez être préparé à un rejet ou une restriction de la part d’Apple à tout moment, et apparemment sans aucune raison » a-t-il prévenu.

Récemment, Apple avait d’ailleurs été épinglé pour avoir banni l’application du dernier Prix Pulitzer. Cette décision a provoqué un tollé aux États-Unis, de nombreux commentateurs estimant que la firme de Cupertino est en pleine dérive dès qu’il s’agit de valider des contenus pour l’App Store. Car pour une fois, il ne s’agissait pas d’une application flirtant avec la ligne jaune (elle ne contenait aucun élément érotique ou violent), puisqu’il s’agissait de caricatures de personnalités publiques.

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